RÉSUMÉ
Parties | A | B | C |
---|---|---|---|
Mesures | Mes.1-52 | 53-81 | 82-121 |
Minutage | 0’ à 1’08 | 1’08 à 1’50 | 1’50 à 2’46 |
Écoute | Mp3 | Mp3 | Mp3 |
Résumé | Ostinato de W-blck Ostinato en hémiole de clar (3 notes) Motifs en notes répétées aux cuivres qui se décalent Fusées virtuoses aux vents (foisonnement) Nombreux décalages Crescendo Harmonie modale (complexification ➞ cluster) | Procédé identique Accents irréguliers à la grosse caisse Partie plus verticale, moins foisonnante mais plus puissante Crescendo à nouveau Harmonie complexe | Motif « Walking bass » dans le grave en hémiole Tutti régulier en noires (métronomique) et retour des accents irréguliers des cuivres Partie très polyrythmique Foisonnement orchestral Crescendo à nouveau |
Parties | D | E | Coda |
---|---|---|---|
Mesures | 122-137 | 138-180 | 181-188 |
Minutage | 2’46 à 3’10 | 3’10 à 4’12 | 4’12 à 4’20 |
Écoute | Mp3 | Mp3 | Mp3 |
Résumé | Partie de transition Ostinato de w-blck Accents aux cuivres Autres accents aux cordes et piccolos (polyrythmie à nouveau) Sons graves en notes tenues (tension) Chaos, puis accalmie à la fin | Pulsation : w-blck ➞ xylo Partie culminante, climax Thème héroïque aux trompettes Contrepoint aux cors très solennel Deux mélodies qui s’opposent au reste de l’orchestre en tutti Harmonie qui se complexifie à nouveau Vaste crescendo à nouveau | Retour des accents aux cuivres et percussions (esprit fanfare) Cadence incisive en Ré maj. Fin simple et efficace. |
A RETENIR :
- Pièce dynamique, incisive, virevoltante,
- Pièce principalement basée sur l’énergie et la vitesse (« les » vitesses),
- Principe général d’une pulsation omniprésente et d’un jeu sur le rythme : accents, décalages, hémioles, changement de mesures,
- Superposition de rythmes très différents : polyrythmie,
- Jeu sur les timbres : foisonnement, oppositions de pupitres, rôle important des cuivres et des percussions,
- Principe répétitif mais avec de nombreuses variations : motifs qui évoluent sans cesse, peu de « réelles » répétitions,
- Thème contrastant « héroïque » en contrepoint dans la partie E, écriture « savante »,
- 5 crescendos successifs,
- Harmonie qui se complexifie dans chaque partie (quelques notes ➞ cluster).
CONCLUSION
Short Ride in a Fast Machine est une pièce tout à fait représentative du style du compositeur. Une grande simplicité apparente qui cache en réalité une grande sophistication, un travail orchestral très important, une pulsation omniprésente mais savamment chahutée tout au long de la pièce, une musique enracinée dans la culture américaine (fanfare, jazz, musique populaire, musique répétitive).
A cette fausse simplicité musicale répond aussi une fausse simplicité d’interprétation. Certes, Short Ride in a Fast Machine est est une pièce sur la vitesse, la précipitation même, la jubilation, mais c’est aussi une pièce sur la fuite en avant. Elle reflète en fait l’état d’esprit, né dans les années 1950 aux États-Unis, de la Beat Generation, une recherche perpétuelle de vitesse, de découverte, de liberté, de nouvelles expériences … quitte à s’en bruler les ailes.
Where O America are you going in your glorious automobile careening down the highway toward what crash in the deep canyon of the Western Rockies, or racing the sunset over Golden Gate toward what wild city jumping with jazz on the Pacific Ocean! | Ô Amérique où vas-tu dans ta voiture splendide qui mène une course folle sur l’autoroute vers quel carambolage dans le profond canyon ouest des Rocheuses, ou voulant dépasser le soleil couchant dans sa course au-dessus du Golden Gate vers quelle ville en délire, se trémoussant aux rythmes du jazz, sur l’Océan Pacifique ! |

Ce poème d’Allen Ginsberg, figure de proue* de la Beat Generation et de la contre-culture américaine, est cité en exergue par John Adams au début de son livre Hallelujah Junction: Composing an American Life.
C’est bien sûr un éloge du Road Trip, de la vitesse, du voyage, de la liberté, des grands espaces, du dépassement de soi. Mais c’est aussi une interrogation profonde sur l’Amérique, voire un avertissement : « Ô Amérique où vas-tu ? » […] « vers quel carambolage » […] « vers quelle ville en délire ».
* avec Jack Kerouac et son livre culte On The Road (1957).
La musique de John Adams est riche et complexe. Elle se nourrit de multiples influences. Chacune des œuvres du compositeur pose autant de repères stables, rassurants et aisément identifiables, qu’elle nourrit des interrogations. Sa musique n’est jamais univoque. Short Ride in a Fast Machine est une pièce jubilatoire, euphorique, patriotique pour certains, mais qui peut aussi s’entendre comme une course sans fin, une course folle, une course à l’abime. John Adams est un compositeur clairement enraciné dans la culture américaine mais qui peut s’en détacher, qui sait s’en montrer critique ou jouer avec elle.
C’est cette richesse, autant dans le domaine du « savoir-faire » musical qu’au niveau du « sens » de sa musique, qui fait de John Adams un compositeur majeur de la seconde moitié du XXe siècle.
QUESTIONS
Short Ride in a Fast Machine entre aisément dans au moins trois des quatre grandes questions du programme de Terminale L.
– La musique, le timbre, le son.
- Pièce extrêmement riche au niveau des timbres utilisés.
- Timbres sans cesse en évolution.
- Références à la fanfare (cuivres et percussions).
- Utilisation particulière des pupitres (en blocs).
- Alternance entre passages limpides et sensation de chaos.
– La musique, le rythme et le temps.
- Jeu sur la vitesse.
- Pulsation omniprésente.
- Superposition d’ostinatos.
- Hémioles et accents qui bousculent la sensation de régularité.
- Organisation en 5 parties très claires, avec crescendos successifs et complexification progressive.
- Coda simple et efficace.
– La musique, diversité et relativité des cultures.
- Références à la fanfare.
- Références au jazz.
- Références à la musique symphonique européenne (grand orchestre).
- Références à la musique minimaliste.
– La musique, l’interprétation et l’arrangement.
Moins d’éléments pour cette dernière question du programme. A noter cependant quelques interprétations pour orchestres d’harmonie (donc sans cordes). Mais compte tenu de l’écriture de J. Adams, on comprend que cela ne change pas radicalement la couleur de cette pièce (on rappelle que les cordes ont ici un rôle très secondaire).
![]() | Short Ride in a Fast Machine par The US Air Force Band of the West (version pour orchestre d’harmonie) : Short Ride in a Fast Machine |