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THIERRY MACHUEL

Biographie


1. BIOGRAPHIE.

Compositeur et pianiste français, né à Paris en 1962, Thierry Machuel est imprégné dès son enfance par le chant choral en participant à l’ensemble vocal que son père dirige. Il consacre, comme compositeur, la majeure partie de son travail à l’art choral, à partir de textes essentiellement profanes, d’auteurs contemporains, dans des langues très variées.

Son œuvre aborde des sujets très divers, mais toutes ces pièces ont en commun une spiritualité très marquée, une recherche mystique pour certaines d’entre elles, un désir de communication, de communion, de retrouver l’essence même de la parole, de ce qui fonde l’humanité. Il fait ainsi une large place aux textes de témoignage, aux écrits de résistants ou de communautés ayant eu des expériences de vie singulières, comme, par exemple, les textes, mis en musique, recueillis auprès de détenus de la prison de Clairvaux entre 2008 et 2011 (« Or, les murs », Grand Prix de l’Académie Charles Cros 2010).

Il a été pensionnaire de la Villa Médicis et de la Casa Velázquez, s’est vu attribuer le prix Sacem de la musique vocale en 2008, la bourse de la Fondation Beaumarchais en 2009 et une commande du Ministère de la Culture en 2010 pour la création de son prochain opéra, ainsi que le Grand Prix Lycéen des Compositeurs en 2011. 

Machuel - Clairvaux

Depuis une dizaine d’années, il enseigne la composition pour chœur selon une méthode personnelle, basée à la fois sur le choix rigoureux des textes, et leur étude approfondie, littéraire, rythmique, sonore. Il fait partie de ceux qui ont le mieux contribué à ce que soit reconnue la spécificité de l’écriture chorale en France, et que puissent émerger de nouvelles générations de compositeurs attirés par cet art. Ses œuvres chorales sont chantées dans de très nombreux pays.

Dates :

1962 : Naissance à Paris

1993 : Grand prix d’improvisation classique (piano) au concours international de Montbrison 

1996-1998 : Pensionnaire à la Villa Médicis (Rome) 

1999-2001 : Pensionnaire à la Casa de Velázquez (Madrid) 

2004 : Premier CD monographique Psalm

2005 : création de l’oratorio Une femme de parole

2007 : création de l’oratorio L’encore aveugle

2008 / 2009 : création des Nocturnes de Clairvaux, des Paroles contre l’oubli

mai 2009 : CD monographique Sur la terre simple

janvier 2010 : CD monographique Nativités profanes

septembre 2010 : coffret Clairvaux,  Or, les murs … (Grand prix de l’académie Charles Cros, Clef d’or ResMusica)

mars 2011 : Grand Prix Lycéen des Compositeurs 

novembre 2011 : CD monographique Lucis memoria 


2. EXTRAITS MUSICAUX.

Ave Maris Stella, op.3 (texte en latin, à la mémoire des marins disparus en mer) Ave Maris Stella

Nocturne Richter, op.7 (texte en français, parle de la nuit comme traversée mystique) Nocturne Richter

Psalm, op.14 (texte en Allemand et Latin, parle des persécutions nazies durant la Seconde Guerre) Psalm

Jiv, op.20 (texte en Russe, parle des déportations aux Goulags sous Staline) Jiv

Under en Sten, op.21 (texte en Danois, parle de la communion entre les vivants et les morts) Under en Sten

Un étranger, avec, sous le bras, un livre de petit format, op.27 (texte en Français, parle de la rencontre, le l’Autre) Un étranger, avec, sous le bras, un livre de petit format

Élégies romanes, op.28 (texte en Roumain, parle de la mort) Élégies romanes

The invisible kingdom, op.33 (texte en Anglais, parle de l’espoir) The invisible kingdom

Nocturnes de Clairvaux, op.49 (texte en français, paroles de détenus de Clairvaux et de moines de Cîteaux) Nocturnes de Clairvaux


3. RÉFÉRENCES AU PASSÉ.

Thierry Machuel utilise dans son langage musical nombre de principes d’écriture préexistants, comme, par exemple, ceux issus de la musique française du XXème siècle, représentée notamment par Debussy, Ravel, Messiaen ou Dutilleux. Alors que certaines œuvres chorales du XXe siècle avaient ouvert de nouvelles voies (œuvres avant-gardistes) comme dans les exemples suivants, Thierry Machuel intègre lui une grande partie des codes du passé (modalité, tonalité, harmonie, musique mesurée, figuralisme*, …), mais dans une attitude de postmodernité (c’est-à-dire qu’il utilise aussi des procédés musicaux propre à la 2nde moitiés du XXe siècle) à l’instar d’autres compositeurs de sa génération comme Nicolas Bacri ou Philippe Hersant.

* Figuralisme : Procédé musical (très utilisé à la Renaissance et au Baroque) consistant à traduire musicalement les images du texte par analogie. Par exemple, une mélodie ascendante sur la phrase « Il monte au ciel », une mélodie descendante sur « je tombe », un accord sombre sur « la mort ». T. Machuel n’utilise pas de figuralismes aussi explicites, cependant, comme on le verra, il en utilise dans toutes ses œuvres, et notamment celles au programme.

Exemples d’œuvres vocales avant-gardistes :

Lux aeterna (1966) de Ligeti Lux aeterna

Sequenza III (1966) de Bério Sequenza III

Nuits (1967) de Xenakis Nuits

Stimmung (1968) de K. Stockhausen Stimmung

Récitations 10 (1978) d’Aperghis Récitations 10

Exemples d’œuvres vocales proches de l’esthétique de Machuel :

– O sacrum convivium (1937) d’Olivier Messiaen O sacrum convivium

Katisma (Vigilia, 1972) de Einojuhani Rautavaara Katisma

Aus Tiefer Not (Psaume CXXX), pour chœur mixte, viole de gambe et orgue (1994) de Philippe Hersant Aus Tiefer Not (Psaume CXXX)

Quare tristis es, Cinq motets de souffrance et de consolation, op. 59 (1998) de Nicolas Bacri Quare tristis es

Thierry Machuel ne cherche pas à proposer un langage musical révolutionnaire, comme les avant-gardistes le souhaitaient, mais plutôt une expression nouvelle, proche des mots, puisant au gré des textes, dans un patrimoine musical établi ou au contraire, explorant des contrés sonores inouïes. En post-moderne, rien ne lui est interdit, il n’a pas de tabou sur le plan musical. Sa musique est consonante quand elle le doit, dissonante s’il le faut, pulsée si nécessaire, complexe par moment, ou limpide si le texte l’exige.

4. UN COMPOSITEUR POUR LA VOIX.

Thierry Machuel entretient un lien étroit avec les textes qu’il met en musique et toutes les techniques qu’il utilise dans ses œuvres découlent en grande partie du sens ou de la musique même des mots. Il accorde une grande importance à la transmission de la parole du poète, à ne pas la dénaturer, mais souhaite, par sa mise en musique, la transfigurer (c’est-à-dire la porter « au-delà »). Par une technique de composition inspirée des inflexions de la voix parlée, très loin des effets extrêmes de la musique du XXe siècle, il construit une œuvre rigoureuse, centrée sur la voix, la parole, la transmission, l’Autre, la rencontre, l’émotion.